Michel Onfray n'est pas certainement pas un "politique". Ni un "philosophe" au sens noble de ce terme qui, comme le reste, est victime d'une prodigieuse inflation, prouvant au besoin que l'Homme moderne est le contraire du légendaire alchimiste, capable de transformer les excréments en or.
Mais médiatique, il l'est assurément. Sous ce label de "penseur médiatique" - et donc forcément de "bon client" - il forme avec les agrégés B.-H. Lévy et A. Finkielkraut, rejoints par E. Zemmour, tout de même diplômé de Sciences Po, un quatuor d'enfer que le monde entier doit - ou devrait - nous envier.
La dernière polémique en date, dont on sait que nos médias raffolent comme le junkie de la seringue, tourne autour d'une interview accordée par M. Onfray au Figaro (1) où il dit par exemple (je souligne) :
Le Figaro : Une partie de l’opinion publique française est réticente à l’idée d’accueillir des réfugiés. Comment analysez-vous cette réaction ?
Michel Onfray : « Le peuple français est méprisé depuis que Mitterrand a converti le socialisme à l’Europe libérale en 1983. Ce peuple, notre peuple, mon peuple, est oublié au profit de micropeuples de substitution : les marges célébrées par la Pensée d’après 68 - les Palestiniens et les schizophrènes de Deleuze, les homosexuels et les hermaphrodites, les fous et les prisonniers de Foucault, les métis d’Hocquenghem et les étrangers de Schérer, les sans-papiers de Badiou. Il fallait, il faut et il faudra que ces marges cessent de l’être, bien sûr, c’est entendu, mais pas au détriment du centre devenu marge : le peuple old school auquel parlait le PCF (le peuple qui est le mien et que j’aime) et auquel il ne parle plus, rallié lui aussi aux dogmes dominants.»
Michel Onfray : « Le peuple français est méprisé depuis que Mitterrand a converti le socialisme à l’Europe libérale en 1983. Ce peuple, notre peuple, mon peuple, est oublié au profit de micropeuples de substitution : les marges célébrées par la Pensée d’après 68 - les Palestiniens et les schizophrènes de Deleuze, les homosexuels et les hermaphrodites, les fous et les prisonniers de Foucault, les métis d’Hocquenghem et les étrangers de Schérer, les sans-papiers de Badiou. Il fallait, il faut et il faudra que ces marges cessent de l’être, bien sûr, c’est entendu, mais pas au détriment du centre devenu marge : le peuple old school auquel parlait le PCF (le peuple qui est le mien et que j’aime) et auquel il ne parle plus, rallié lui aussi aux dogmes dominants.»
Le Figaro : Est-ce «ce peuple» qui vote Marine Le Pen ?
Michel Onfray : «C’est à ce peuple que parle Marine Le Pen. Je lui en veux moins à elle qu’à ceux qui la rendent possible. Ce peuple old school se voit marginalisé alors que les marges deviennent le souci français prioritaire, avec grandes messes cathodiques de fraternités avec les populations étrangères accueillies devant les caméras du 20 heures. Si ce peuple pense mal, c’est parce que nombreux sont ceux qui l’aident à mal penser. Qu’un paysan en faillite, un chômeur de longue durée, un jeune surdiplômé sans emploi, une mère seule au foyer, une caissière smicarde, un ancien avec une retraite de misère, un artisan au bord du dépôt de bilan disent : «Et qu’est-ce qu’on fait pour moi pendant ce temps-là ?» Je n’y vois rien d’obscène. Ni de xénophobe. Juste une souffrance. La République n’a pas à faire la sourde oreille à la souffrance des siens.»
Il est évident qu'en citant des noms comme G. Deleuze, G. Hocquenghem, R. Schérer et A. Badiou, qui ont tous enseigné - coïncidence ? - à l'université de Paris-8 (Vincennes/Saint-Denis), M. Onfray marche sur les plate-bandes de son "nouvel ami" E. Zemmour en fustigeant la "pensée de 68" et en dénonçant la gauche bien-pensante comme il le fera une semaine plus tard, à peine arrivé sur le plateau de la grand messe cathodique, célébrée tous les samedis soir par le maître de cérémonie et de l'info-divertissement Laurent Ruquier.
Ensuite, l'utilisation du mot peuple : dans le court extrait cité, le mot revient huit fois, et même un interprète peu chevronné constatera une répétition emphatique (Ce peuple, notre peuple, mon peuple) et son recrutement pour une confession exaltée d'appartenance (le peuple qui est le mien et que j’aime). Cette réaction émotionnelle en chaîne contraste avec la seule occurrence d'un quasi synonyme, bien moins connoté : les populations qui, elles, sont étrangères.